L'Affaire Saint-Fiacre
Georges Simenon
Un grattement timide à la porte; le bruit d'un objet posé sur le plancher, une voix furtive: " Il est cinq heures et demie! Le premier coup de la messe vient de sonner... " Maigret fit grincer le sommier du lit en se soulevant sur les coudes et tandis qu'il regardait avec étonnement la lucarne percée dans le toit en pente, la voix reprit: " Est-ce que vous communiez? " Maintenant, le commissaire Maigret était debout, les pieds nus sur le plancher glacial. Il marcha vers la porte qui fermait à l'aide d'une ficelle enroulée à deux clous. Il y eut des pas qui fuyaient, et, quand il fut dans le couloir, il eut juste le temps d'apercevoir une silhouette de femme en camisole et en jupon blanc. Alors il ramassa le broc d'eau chaude que Marie Tatin lui avait apporté, ferma sa porte, chercha un bout de miroir devant lequel se raser. « Un crime sera commis à l'église de Saint-Fiacre pendant la première messe du Jour des morts. » Ce message anonyme, reçu par la police de Moulins, va ramener Maigret sur les lieux de son enfance. La victime - car elle meurt bel et bien comme annoncé - n'est autre que la comtesse de Saint-Fiacre, propriétaire du château dont le père de Maigret était le régisseur. Tout a bien changé en trente-cinq ans. Le domaine n'est plus que l'ombre de ce qu'il était, rétréci comme une peau de chagrin par des ventes de terres successives, dues sans doute aux dilapidations du jeune Maurice de Saint-Fiacre, à moins que les secrétaires et amants de la comtesse n'aient trouvé moyen de se servir au passage. Et c'est bien de ce côté que Maigret va chercher la clef de l'affaire, en attendant qu'un étrange dîner « sous le signe de Walter Scott » ne la lui apporte de la façon la plus imprévue. ...